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Étretat, 15 de septiembre de 1888
Señora,
Estoy tan avergonzado que apenas me atrevo a
escribirle. Mi única excusa es el estado de padecimientos continuos en los que
vivo; mis jaquecas no me dejan día y noche. También no he hecho nada,
absolutamente nada y mi novela1 está en el mismo punto que durante
mi marcha de París. Paso unos días dolorosos y vacíos, esperando todavía el
final de este estado que me sume en una torpeza tal, que no tengo ni la
energía de escribir una carta ni la de irme. Debo seguramente la prolongación
de estos males a mi estancia en París, que cada vez me produce el mismo efecto.
Ignorando donde se encontrará, le envío esta
carta al bulevar Haussmann, pues pienso que usted habrá abandonado hace tiempo
esa taza que se llama Royat.
Aquí asisto a todo lo que pasa cada año en una
playa. Hago un comentario que no es nuevo, pero que no me había afectado tanto
nunca como este año; se trata del acuerdo que se establece entre un hombre y
una mujer que comienzan una relación que está basada, no sobre los estados de
espíritu concordantes, sino sobre un mismo nivel intelectual y social. Cuando
digo social, me equivoco. La situación real no significa nada, es la situación
que se merece por su naturaleza, la que únicamente determina la elección. He
tenido bajo los ojos algunos extraños ejemplos este verano para confirmar el
proverbio « cada oveja... con su pareja».
Se ha visto, desde luego, reyes casándose con
pastoras, pero esos reyes, como casi todos, habían nacido para ser pastores, y
yo comienzo a dudar mucho de que un ser superior, de pedigrí y delicado
refinamiento, puede enamorarse de una criatura rudimentaria. Un hombre muy
inteligente, un hombre de genio, puede ser de raza común, dotado de una
sensibilidad vulgar y carecer del tacto elevado que determina la jerarquía de
los seres en el orden moral. Este enunciado de principios debe parecerle
imprevisto, pues usted no ha visto todas las estúpidas intrigas de nuestra
playa, pero imagino que usted ha visto otras, que igualmente son válidas.
Encuentro que el amor en los campos debe ser de
una esencia muy delicada para no convertirse en ridículo. He visto personas a
las que quería mucho besarse al claro de luna, y me han sorprendido esas
personan a quiénes no podía convenir una habitación de hotel amueblado, a las
que yo nunca me atrevería a hacerles eso ante la luna creciente. No crea, al
menos, Señora, leyendo estas reflexiones, que yo preparo una psicología de
amor en los campos. Estoy en un estado de ánimo que me llevaría más bien a
tratar de la sabiduría, pues lo que pasa al alcance de mis ojos ne esta hecho
para empujarme al sentimiento, o incluso a su mímica.
De esto todavía se priva uno bien, pero lo que
hay más desolador en esta región, es el valor intelectual de sus habitantes.
Ni artistas, ni personas de mundo (no echo de menos a estos últimos excepto por
la vista del decorado) sino personas de bolsa, pobres, lo que es el último
escalón de la miseria social. Se oye, en las veladas donde las mujeres no dicen
nada, a los hombres hablar de las obligaciones portuguesas, de las consolidadas,
o del precio del flete de Trieste a Constantinopla. Aparte de esto, no saben
nada y se asombran mucho cuando se les dice de algún modo que son estúpidos,
pues yo no lo resisto más.
Pienso a menudo en las veladas del domingo y las
echo mucho de menos, y esas no las disfruto aquí.
Adiós, Señora, beso sus manos con respeto. Le
ruego que crea en mi profunda devoción y expreso toda mi amistad a su marido.
GUY DE MAUPASSANT
1.
Fort comme la Mort, comenzada en la primavera de 1888.
Traducción de José M. Ramos González para http://www.iesxunqueira1.com/maupassant
Étretat, 15 sept. 1888.
Madame,
Je suis tellement honteux que j'ose à peine vous
écrire. Ma seule excuse est l'état de souffrance constant où je vis ; mes
migraines ne me quittent plus ni jour ni nuit. Aussi n'ai-je rien fait,
absolument rien et mon roman1 en est au même point que lors de mon départ de
Paris. Je passe des jours douloureux et vides, attendant encore la fin de cet
état qui me plonge dans une telle torpeur que je n'ai pas plus l'énergie
d'écrire une lettre que celle de m'en aller. Je dois assurément la
prolongation de ces malaises à mon séjour à Paris, qui me produit chaque fois
le même effet.
Ne sachant où cette lettre vous trouvera,
je vous l'envoie boulevard Haussmann, car je pense que vous aurez quitté depuis
longtemps cette cuvette qu'on nomme Royat.
Ici j'assiste à tout ce qui se passe
chaque année sur une plage. J'y fais une remarque qui n'est pas neuve, mais qui
ne m'avait jamais tant frappé que cette année, c'est combien l'accord qui se
fait entre un homme et une femme qui commencent une liaison est basé, non point
sur les états d'esprit concordants, mais sur un même niveau intellectuel et
social. Quand je dis social, j'ai tort. La situation réelle ne signifie rien,
c'est la situation qu'on mérite par sa nature, qui seule détermine le choix.
J'ai eu sous les yeux quelques exemples bizarres cet été pour confirmer le
proverbe « Qui se ressemble..., s'assemble ».
On a vu, certes, des rois épouser des bergères,
mais ces rois-là, comme presque tous, étaient nés pour être bergers, et je
commence à douter beaucoup qu'un être supérieur, de race fine et de
délicatesse raffinée, puisse devenir amoureux d'une créature très
rudimentaire. Un homme très intelligent, un homme de génie, peut être de race
commune, doué d'une sensibilité vulgaire et manquer du tact élevé qui fait
la hiérarchie des êtres dans l'ordre moral. Cet énoncé de principes doit
vous paraître bien imprévu, car vous n'avez pas vu toutes les sottes intrigues
de notre plage, mais j'imagine que vous en avez vu d'autres, qui les valent.
Je trouve que l'amour à la campagne doit être
d'essence très délicate pour ne point devenir ridicule. J'ai vu des gens que
j'aimais beaucoup s'embrasser au clair de lune, et ils m'ont si fort choqué,
ces gens à qui ne pouvait convenir une chambre d'hôtel meublé, que je
n'oserai plus jamais en faire autant en face du croissant. Ne croyez pas, au
moins, Madame, en lisant ces réflexions, que je prépare une physiologie de
l'amour aux champs. Je suis dans un état d'âme qui me porterait plutôt à
traiter de la sagesse, car ce qui passe à portée de mes yeux n'est point fait
pour me pousser au sentiment, ou même à sa mimique.
De cela encore, on se prive fort bien, mais ce qu'il y a de plus désolant dans
ce pays, c'est la valeur intellectuelle de ses habitants. Ni artistes, ni gens
du monde (je ne regrette ces derniers qu'au point de vue du décor) mais des
gens de bourse, pauvres, ce qui est le dernier échelon de la misère sociale.
On entend, dans les soirées où les femmes ne disent rien, les hommes parler
des obligations portugaises, des consolidés, ou du prix du fret de Trieste à
Constantinople. Hors cela, ils ne savent rien et s'étonnent beaucoup quand on
leur dit avec quelque forme qu'ils sont bêtes, car je n'y résiste pas.
Je pense souvent aux soirées du dimanche et je
les regrette fortement, mais cela ne me les rend pas ici.
Adieu, Madame, je baise vos mains avec respect.
Je vous prie de croire à mon profond dévouement et d'exprimer toute mon
amitié à votre mari.
GUY DE MAUPASSANT
1 Fort comme la Mort, commencé au printemps de 1888.
Puesto en formato html por Thierry Selva: http://maupassant.free.fr/